En 1959, chef de service intérimaire, il voit le service de l'hôpital Charles Nicolle partagé entre lui,assistant depuis 1951 au sein du service du Pr Jean Demirleau et le Dr Essafi, arrivé en Tunisie en 1957, enfin troisième injustice en 1962 , nomination sur ordre présidentiel du Docteur Zouheir Essafi en tant que chef de service de chirurgie de l'hôpital Charles Nicolle ...Son nom a été barré à la Présidence sur instigation de qui ? De Ahmed Ben Salah ??? ou de quelqu'un d'autre ...Les archives de l'hôpital Charles Nicolle contiennent tous les compte rendus opératoires des interventions subies par les manifestants blessés au cours de cette décennie 50 ...( J'ai retrouvé un blessé du 18 janvier 1952, qui raconte comment et dans quelles circonstances il a été opéré par le docteur Mohamed Zouaoui) Et comme toujours il a toujours dit qu'il n'avait fait que son devoir de patriote et qu'il ne voulait ni décoration ni autre chose...
Après l'Indépendance, de nouveaux visages de médecins qui n'ont pas vécu la lutte contre le colonialisme sont arrivés et ont cueilli le fruit de la lutte de leurs aînés...C'est avec cette colère contre l'injustice que j'ai vécue toute ma vie...Et j'espère qu'aujourd'hui l'Histoire se ressouviendra de sa mémoire ...
L'ingérence du politique dans la médecine n'est pas nouveau et doit être éradiqué une fois pour toutes...
Ce chirurgien dont on va publier les mémoires a vu sa carrière saccagée par les instances politiques malgré son concours inégalable en ce temps-là ...La lutte contre le colonisateur a été menée par de nombreuses personnalités dans de nombreux domaines, et notamment, il s'agit ici de la chirurgie viscérale abdominale et thoracique ...Il a pratiqué les premières opérations sur le coeur en 1955- 56 ...On a saccagé sa carrière parce qu'il avait un esprit libre et indépendant ...et on l'a pratiquement gommé de l'histoire de la médecine soit par ignorance soit par opportunisme...C'est la Tunisie qui a perdu cette compétence avant l'heure ...Avant de mourir, l'une de ses dernières phrases a été "Et puis, je m'en fous "...J'aurais aimé le voir vivant aujourd'hui pour profiter du bonheur de la Liberté retrouvée!
C'est aussi un message aux Jeunes, l'ingérence du parti était là avant la prise de pouvoir définitive et n'a fait qu'empirer au fil des années...Chaque médecin de cette époque a vu son nom nommer sa rue ; la rue ou l'avenue , l'ex- Avenue Aristide Briand, c'est lui qui l'a mise en valeur et qui a drainé par la suite un grand nombre d'institutions de la Santé ...Il a été l'un des premiers à créer le comité de quartier de Bab-Saadoun, lutté contre la pollution sonore de l'ex salle de fêtes , devenue Centre de transfusion sanguine, en plein centre hospitalier ...Aujourd'hui, alors qu'il avait été le premier à construire une clinique dans cet endroit, cette avenue est devenu un centre incontournable de toutes les institutions qui comptent en matière de santé publique : Ministère de la Santé, Faculté de Médecine et de tout le centre hospitalier, c'est lui le premier qui a mis cette avenue et cet endroit en valeur ; c'est lui qui a fait communiquer le bas de l'avenue avec son point le culminant , par le passage d'un trax et pour accéder plus facilement à Charles Nicolle ...Mort en 1994, le pays ne lui doit-il pas cette ultime reconnaissance ? Aucune rue, aucun hôpital, aucun amphithéâtre ne portent son nom même s'il a fait partie des pionniers de la chirurgie tunisienne et des pionniers de la formation des cadres de la santé, à l'Ecole Avicenne dès 1957 et qu'il était tout indiqué pour assurer la relève à l'avènement de l'Indépendance... Je ne vois pas quel est le sens d'une avenue ou d'une rue Djebel Lakhdhar, rue que tout le monde a toujours appelé Saada edooktour Mohamed Zouaoui ...Paix à son âme et à celle de ceux qui lui ont fait du tort...
FAÏZA ZOUAOUI SKANDRANI
Le 09 février 2011